Article 64
Tout Congolais a le devoir de faire échec à tout individu ou groupe d’individus qui prend le pouvoir par la force ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution.
Toute tentative de renversement du régime constitutionnel constitue une infraction imprescriptible contre la nation et l’Etat. Elle est punie conformément à la loi.
Un groupe de Congolais bien identifiés se fondent sur cet article pour y baser leurs critiques sur l’initiative de révision de la Constitution. C’est leur choix de cet article qui justifie aujourd’hui notre démarche d’analyse du contenu de cet article pour déterminer si on peut l’utiliser en toute orthodoxie ou en toute pertinence contre une quelconque initiative de révision constitutionnelle.
L’analyse de l’article
Le devoir est donné à tout Congolais. Donc, n’importe quel Congolais qui est au courant d’initiatives ou des choses décriées ici doit tout faire pour qu’elles n’aboutissent pas ou qu’elles cessent d’exister. C’est donc constitutionnel que des voix s’élèvent quand les initiatives décriées sont amorcées par un Congolais ou groupe de Congolais.
Quel est alors l’entendement de « prendre le pouvoir par la force » dans un premier temps ? La RDC est un Etat démocratique. En tant que telle, pour y prendre le pouvoir, ça doit l’être en vertu d’élections libres, transparentes, pluralistes, démocratiques et crédibles. Tout pouvoir donc qui n’a pas été obtenu par cette voie n’est pas à supporter, à accepter ou à homologuer. Nous croyons que cette partie du 1er alinéa de cet article vise à bloquer ceux qui sont tentés de faire des coups d’Etat ou des rébellions pour accéder au pouvoir. Historiquement, il se justifie car la RDC faisait face à un foisonnement des mouvements politico-militaires qui tous visaient la prise du pouvoir suprême en RDC par les armes. Bien sûr, dans une démocratie, le Premier-ministre n’est pas élu mais il est choisi par le Président élu suivant une procédure et des mécanismes définis dans la Constitution.
Comment comprendre « …ou qui l’exerce en violation des dispositions de la présente Constitution… » ? Cette partie suppose que celui dont il s’agit est déjà au pouvoir mais il exerce son pouvoir en violation de la présente Constitution. Il est ici question de relever ces violations pour déterminer si elles peuvent donner lieu à la déchéance du Chef de l’Etat. Qu’est-ce que ça peut être ? Difficile de le prédire.
Dans le premier cas comme dans le deuxième, le devoir, le quitus, le feu vert est donné à n’importe quel Congolais, pas seulement aux Congolais ayant des partis politiques ou qui y œuvrent ainsi que les Parlementaires provinciaux ou nationaux, pas seulement ceux qui travaillent dans l’administration publique, pas seulement ceux qui sont riches, de l’Est, de l’Ouest, de la diaspora, etc., de faire échec.
Maintenant, comment comprendre «Toute tentative de renversement du régime constitutionnel » ? Je ne suis pas juriste et je ne pense pas que je prêche contre le droit lorsque je dis que ce passage signifie tentative de diriger le pays sans Constitution c’est-à-dire diriger un pays via les Ordonnances et Décrets en se référant à son bon sens sans qu’il y ait une Constitution écrite. De surcroît, la RDC a un régime semi-parlementaire ou semi-présidentiel inscrit dans sa Constitution. Ce passage le consacre-t-il ?
Il apparaît évident que des marches, des manifestations, voire les exhortations constantes aux troubles dans le pays pour y faire régner l’apocalypse ne peuvent être étayées par l’article 64 de la Constitution congolaise actuelle. Si donc il y a des gens qui citaient cet article pour empêcher la révision constitutionnelle ou pour promettre toutes les étincelles du monde à ceux qui tenteraient une moindre révision constitutionnelle, ils doivent bien le lire et l’analyser. Cet article ne donne pas le prétexte ou l’argument juridique aux opposants indélicats et mal intentionnés de talonner n’importe comment le pouvoir s’il initie une révision constitutionnelle. D’ailleurs, le pouvoir est mieux placé, aux termes de l’actuelle Constitution en son article 218, pour initier une révision constitutionnelle.
Yvon RAMAZANI