LE PARADIGME ETIENNE TSHISEKEDI
Le mercredi 14 décembre 1932 naissait à Luluabourg dans le foyer d’Alexis MULUMBA et Agnès KABENA un garçon, leur deuxième fils, au nom d’Etienne TSHISEKEDI.
Les parcours scolaire, universitaire, professionnel et politique de ce dernier montrent à suffisance qu’il s’agissait ce jour –là d’un précieux don de la Providence au grand Congo ex belge, situé au cœur de l’Afrique.
Ils sont nombreux les témoignages écrits et oraux de son passage au grand Collège St Jean Berchmans de Kamponde, à la célèbre Université Lovanium de Léopoldville, à l’Ecole Nationale de Droit et d’Administration (ENDA) etc.. qui attestent que c’est vraiment une perle rare dans l’histoire du pays de nos ancêtres.
Je ne saurais commencer ma réflexion , dans le contexte de ce 14 décembre 2014, sans rendre grâce à l’AUTEUR de LA VIE pour avoir accordé à la RDC ce don précieux qu’est Etienne TSHISEKEDI .
- Etienne Tshisekedi, incarnation de l’excellence
J’évoquerai, en premier lieu, le témoignage recueilli par moi-même auprès de mon propre père qui l’admirait et me le présentait comme archétype de l’excellence déjà dans les années 1963 -1965 au vu de mes performances scolaires en me collant le surnom du titre de Etienne TSHISEKEDI : « Docteur en Droit ». C’était le rêve-fou d’un père pour un fils dont il était content des résultats scolaires et auquel il recommandait la voie del’excellence.
En second lieu ,j’ajouterai celui d’un ancien élève de Kamponde qui avait eu le privilège d’avoir , plus d’une décennie après la promotion TSHISEKEDI , le même professeur de dissertation française que ce dernier. Le professeur, un prêtre belge, a continué à présenter à ses élèves comme modèle de réflexion et de pensée bien structurée la copie d’une dissertation de TSHISEKEDI. Dans le même ordre d’idées, un cadre du Parti, candidat aux législatives de 2011, qui se reconnaîtra en me lisant, m’avait rapporté que lors de son passage à Kamponde en 2011 pendant la période de campagne le prêtre Directeur du célèbre Collège lui a présenté, bien conservés pour la postérité, les bulletins du meilleur élève de tous les temps, Etienne TSHISEKEDI.
Parmi ses adversaires politiques (j’entends par là ceux qui à un moment ou un autre de notre histoire ont eu des divergences idéologico-politiques avec lui), je citerai le témoignage de Feu maître Moreno KINKELA vi KAN’SY, ancien ministre de Laurent Désiré KABILA de 1997 à 1998.
Lorsque après l’arrivée de LDK à Kinshasa , Etienne TSHISEKEDI voulut le rencontrer ,il en fût empêché par les BUGERA , KABAREBE , BIZIMA et autres . S’adressant à la presse , TSHISEKEDI s’étonnera de constater que LDK était l’otage des militaires des pays voisins et demandera à ceux-ci, après les avoir remerciés de nous avoir apporté leur aide, de nous présenter la facture et de nous laisser nous concerter pour reconstruire notre pays. Le pouvoir AFDL y apporta un démenti formel en déclarant qu’il n’y avait aucun étranger dans ses rangs. Dans le lot, maître KINKELA intervenant sur une radio accusera TSHISEKEDI d’entretenir des préjugés racistes se basant sur le délit de faciès. Près de quinze mois plus tard, en août 1998 éclatera la guerre du RCD. Un dimanche d’août 1998, lors de la messe latino-française à Matonge/ Saint Joseph à laquelle nous étions invités dans le cadre des activités des Intellectuels Catholiques de Kinshasa , appelé à prendre la parole par les organisateurs , Maître KINKELA , en homme honnête , salua , tout en lui demandant de pardonner ses propos à l’époque, l’esprit visionnaire du Sage et Grand frère (selon ses propres termes) Etienne TSHISEKEDI qui avait vu juste à temps.
En 2003 le 6 janvier, accordant une interview au journal « Le Potentiel », maître KINKELA répond à l’une des questions de Marcel LUTETE et BUANA KABUE. « Qui souhaitez-vous voir à la Vice-Présidence de la République pour le compte de l’Opposition politique ? » Réponse : « S’il n’est pas dénoncé par des tiers pour des actes et faits incompatibles et inconnus de nous et s’il accepte de tendre loyalement la main au Président Joseph KABILA, je préfère de loin monsieur Etienne TSHISEKEDI. Son atout : il se bat pour des idées et il dit ce qu’il pense sans flagornerie… ». C’est ici le lieu de rappeler que Maître KINKELA parle en connaissance de cause car il est dépositaire de tous les rapports et Actes de la CNS dont il fut le Rapporteur Général.
Oui, le grand atout de Tshisekedi en politique c’est qu’à la place de la ruse, la corruption et de la force brutale des armes comme le font tous ses adversaires politiques d’hier et d’aujourd’hui (les mêmes ?) Il fait beaucoup usage de l’intelligence, de la raison et des principes éthiques. Pour paraphraser un homme d’Etat francophone, comme l’écrivit Charles DJUNGU SIMBA : « TSHISEKEDI est le seul congolais (zaïrois) qui sait ce qu’il dit ».
Ce grand Intellectuel applique très bien ce que Piaget disait de la Logique et de l’Ethique : « la logique est la morale de la pensée ; et l’éthique est la logique de l’action ». Et sur ce point-là, il demeurera plus moderne que tous les autres. Il est, de ce fait, de « l’espèce » de Mandela, Martin Luther King et Obama.
Avec un peu de sincérité , l’on se doit de constater qu’à l’exception de Joseph Kasa-Vubu qui avait fait l’équivalent du premier cycle complet des études de philosophie au Grand Séminaire de Kabwe, la RD Congo n’a connu à sa tête que des « autodidactes » dont le cursus scolaire obscur n’est pas comparable à celui du premier Docteur en Droit de la célébrissime Université Lovanium de Léopoldville et premier Recteur congolais de la grande Ecole Supérieure de Droit et d’Administration : l’ENDA.
- Etienne Tshisekedi est politiquement très averti en ce qui concerne la sortie de la crise congolaise répétitive de ces trois dernières décennies.
Dans les années 1980 au plus fort de la pensée unique, avant même la célèbre Lettre ouverte de 52 pages, il propose lors d’une interview à « La Libre Belgique » du 2 Octobre 1980, le retour aux principes et valeurs de la Constitution de Luluabourg.
Avec d’autres cosignataires de la Lettre des Treize Parlementaires, il en appelle à un grand débat nationalréunissant les forces politiques et sociales pour le retour à la démocratie. La suite est connue : la Constitution de Luluabourg a servi tour à tour de matrice aussi bien à la Constitution élaborée par la CNS qu’à celle du 18 février 2006. Le débat national s’est tenu d’abord sous la désignation de Conférence Nationale Souveraine et enfin sous celle deDialogue Inter Congolais de Sun City.
Lorsque la coalition rwando-ougandaise se sert du « conglomérat d’aventuriers » connu sous le nom de l’AFDL pour occuper le Congo, de la Belgique où il était en visite, il est le premier à proposer à MOBUTU la négociation avec LDK et ses parrains.
Il sera menacé d’arrestation dès sa descente à Ndjili par le premier ministre de MOBUTU, KENGO Wa DONDO. Les négociations de l’OUTENICA finiront par avoir lieu dans la suite.
Une année après l’avènement de l’AFDL, prenant le contre-pied de l’appel à une « guerre longue et populaire » avec le slogan « la paix se gagne (par les armes) » de LD Kabila et YERODIA, TSHISEKEDI propose la négociation pour épargner ,dit-il, les vies humaines des jeunes recrutés et envoyés comme boucliers humains au front sans formation militaire adéquate. Il est de nouveau menacé par le régime kabiliste et copieusement injurié à la Radio et la TV.
L’Accord de Lusaka sera conclu quelques mois plus tard et signé pour le compte du pouvoir de Kinshasa par l’un de ses principaux pourfendeurs sur la question : YERODIA Abdoulaye. On avait une fois de plus oublié les injures, les menaces et intimidations publiques contre TSHISEKEDI répercutées en son temps par YERODIA.
Son refus de cautionner l’Accord Partiel et Partial de l’Hôtel des Cascades a fait revenir tous les protagonistes à la table des négociations pour aboutir à l’Accord Global et Inclusif de Sun City(AGI).
Il résiste contre un processus électoral non respectueux des préalables et de l’ordre tracés par l’AGI de Sun City, une constitution taillée sur mesure, et donc non porteurs de paix. Aujourd’hui, la paix se recherche encore à l’Est de notre pays, la Constitution est soumise aux humeurs de ceux qui détiennent la force militaire. Et les communautés locales de base n’ont toujours pas leurs élus locaux, dans l’esprit de l’AGI, gages de leur participation citoyenne à la prise des décisions sur le développement de leurs entités respectives.
3. Etienne Tshisekedi, Choix sincère du Peuple, ne compte ni sur la corruption ni sur la force brutale des armes pour diriger le Congo
Pour se faire élire à la magistrature suprême et faire élire les candidats du Parti à d’autres échelons des scrutins, nous n’avons pas vu Etienne Tshisekedi distribuer bières, billets de banque et T-shirts.
Il a communiqué partout sa vision du Congo et une stratégie ou praxis politique résumé en deux mots devenus magiques : LE PEUPLE D’ABORD
- Conduire le peuple au bonheur par le travail générateur du progrès social ;
- Promouvoir, faire intérioriser, traduire en actes les valeurs fondamentales de la social-démocratie que sont la Liberté sous toutes ses formes, l’Egalité de tous en dignité, en droits et devoirs, la Solidarité de destin (partage du fruit du travail, des richesses du pays) en vue du progrès social, progrès de tout homme et de tout l’homme.
- L’Ethique et la bonne gouvernance comme stratégie ou praxis politique.
Il mise sur la confiance du peuple, gage solide de la légitimité, en prêchant par l’exemple de respect des normes.
L’homme de la théorie « de la vérité des prix » des produits pétroliers, mise en application, ayant cassé, en son temps, comme Premier Ministre de quelques semaines, la spéculation dans ce domaine vital de l’économie et ainsi stabilisé la monnaie. L’homme qui, en quelques jours, avait fait récupérer à l’Etat congolais la presque totalité de son charroi automobile spolié par des tiers et qui fut pour cela surnommé dans certains milieux : « le Préfet de Discipline ».
CONCLUSION :
A l’école de ce grand Homme, dans ma propre expérience aussi bien sociologique (près de 50 ans dans son sillage) que politique (depuis La Lettre de 52 pages), j’ai appris et retenu de cette icône trois grandes valeurs : la Vertu, la Liberté et la Justice .
En questionnant un des philosophes rationalistes dont il s’est beaucoup inspiré, Baruch de SPINOZA, je conclurai ainsi :
« L’ homme qui vit sous le régime de la Vertu –c’est-à-dire du savoir --utilise puissamment la force de la raison, conçue comme un système d’idées adéquates , c’est-à-dire claires et distinctes. Or, en suivant la raison, l’homme retrouve également l’accord et l’unité avec ses semblables. La vie vraiment humaine et sociale se définit par laraison, et l’Etat –c’est-à-dire l’organisation politique de la société -- doit être conçu rationnellement : seul l’Etat rationnel ouvre la voie à la Liberté. En lui , tous les hommes se reconnaissent et ont le pouvoir d’exister et d’agir suivant les lois de la vraie nature humaine…Dans cette perspective pleinement rationnelle , nommons citoyens les hommes considérés comme jouissant de tous les avantages que procure la Cité en vertu du droit civil, défini comme la liberté qu’a l’individu de se conserver dans son état, liberté telle qu’elle est déterminée par les édits du pouvoir souverain…L’Etat préconisé par SPINOZA est de type démocratique. La démocratie désigne alors un régime où nul ne transfère son droit à un autre et où tous sont égaux. Les individus y confrontent librement leurs opinions et leurs droits sont protégés. Ainsi liberté et sécurité sont-elles pleinement assurées. La cité démocratique permet dès lors d’accéder pleinement à la justice, disposition où chacun se voit attribuer ce qui lui revient et ce qui lui est dû. Ainsi se dessine le destin des hommes libres, vivant sous le commandement de la Raison, dans une cité libre.»
BON ET JOYEUX ANNIVERSAIRE A Monsieur le PRESIDENT ELU.
Godefroy Stanislas TSHIMANGA wa MUNTUABO LUABEYA,
Secrétaire National,
Coordonnateur Adjoint Honoraire de la Commission d’Organisation du Premier Congrès