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Addis-Abeba impose le cahier des charges du M23

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LE POTENTIEL, le lundi 25 février 2013 
  L’accord-cadre scellé à Addis-Abeba, sous l’œil vigilant des Nations unies, consacre la partition de la RDC. Dans la foulée, les pourparlers directs engagés il y a deux mois à Kampala entre le gouvernement de la RDC et le M23 sont relancées. Autrement dit,  Kinshasa rentre dans la capitale ougandaise pour endosser le cahier des charges du M23 dont les revendications portent, notamment sur des questions politiques, sécuritaires, économiques et sociales.

Kinshasa a fini par céder.

C’est le moins que l’on puisse dire à la lecture de l’accord-cadre de paix signé le dimanche 24 février à Addis-Abeba par 11 pays africains membres de la  SADC et de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIRGL), sous le parrainage des Nations unies. Pour que rien ne soit laissé de côté, Ban Ki-moon, secrétaire général des Nations unies, a fait le déplacement du siège de l’Union africaine pour donner une caution morale à un accord censé ramener durablement la paix dans l’Est de la République démocratique du Congo.

Si l’accord-cadre d’Addis-Abeba est commenté en divers sens dans l’opinion congolaise, c’est parce qu’il aura levé des équivoques sur des questions jugées à Kampala « illégitimes ou légales » par Kinshasa. Le préambule de l’accord-cadre d’Addis-Abeba fixe en des termes clairs la voie à suivre pour « s’atteler aux causes profondes et mettre un terme aux cycles de violence récurrents » qui minent la partie Est de la RDC. 

Celle-ci doit « continuer et approfondir la réforme du secteur de la sécurité, en particulier en ce qui concerne l’armée et la police ; consolider l’Etat, en particulier à l’Est de la RDC... ; effectuer des progrès en ce qui concerne la décentralisation ; promouvoir le développement économique, y compris au sujet de l’expansion des infrastructures et de la fourniture de services sociaux de base ; promouvoir la réforme structurelle des institutions de l’Etat, y compris la réforme des finances, etc. ». Ce n’est ni plus ni moins reconnaître d’une certaine manière la légitimité des revendications formulées par le M23. Kinshasa se voit contraint de se mettre au pas, cela par des « actions concrètes ».  

KAMPALA RELANCE

Le 12 février 2013, la délégation gouvernementale avait créé la surprise à Kampala en remettant en cause, dans un document de 14 pages transmis à la facilitation ougandaise, l’ordre du jour des pourparlers. Dans ce document, la délégation gouvernementale qualifiait plusieurs demandes des rebelles du M23 « d’illégales, d’illégitimes et d’être sans objet ». Il s’agissait particulièrement des revendications touchant aux questions sécuritaires, sociales, politiques et économiques.

Kinshasa arguait que ces questions étaient déjà évacuées avec les élections de novembre 2011. D’où, le blocage. Les discussions se sont arrêtées et les délégations se sont séparées en queue de poisson. Les délégués dits politiques sont rentrés au bercail. Un groupe restreint d’experts est resté à Kampala pour poursuivre des discussions avec la facilitation ougandaise.

Puis est venue la rencontre d’Addis-Abeba. Kinshasa a, le dimanche 24 février 2013 dans la capitale éthiopienne, signé un accord dont certaines dispositions l’ont affaibli sensiblement.  Acculé de toutes parts, il a accepté, sans le dire ouvertement, de revenir sur sa position.  Des sources dignes de foi ont rapporté que des délégués du gouvernement ont repris hier lundi la route de la capitale ougandaise. Pour quoi y faire ? Sans doute pour reprendre langue avec les délégués du M23, à la lumière du nouveau contexte imprimé par l’accord-cadre d’Addis-Abeba.

Voilà, Kampala est relancé et plus de tabou. Toutes les questions seront abordées et traitées, même celles qui fâchent. « Est pris qui croyait prendre », pourrait-on dire. Kinshasa est mis devant un fait accompli : ouvrir toutes les institutions de la République au M23, sous la bénédiction de la communauté internationale. C’est d’ailleurs elle qui veillera à la matérialisation de ce triomphe du M23 à travers le mécanisme 11+4, ayant pour « brigade canine » la Monusco.   

LE SCHEMA COHEN-SARKOZY EN MARCHE

Kinshasa est plus jamais désarmé. Il aborde ce nouveau round de pourparlers de Kampala avec un sérieux handicap : on le tient par les couilles. Affaibli, il ne peut plus relever la tête ni rouspéter. Au risque de se faire lyncher  par les sous-traitants du projet de balkanisation du Congo. Pour ceux qui suivent de très près l’évolution de la situation politique en RDC depuis son indépendance, l’Accord-cadre d’Addis-Abeba n’est pas une surprise du tout. C’est plutôt une suite logique dans la planification de la partition de l’ex-Colonie belge dont l’étendue territoriale  et les richesses innombrables font saliver tous les vautours de la planète.

Quelque part dans le monde occidental, il y a des gens qui se frottent des mains pour avoir franchi cette étape. Il s’agit, entre autres, des Américains Herman Cohen, Bill et Hillary Clinton, Susan Rice, Joe Frazer, Johnnie Carson, de l’Anglais Tony Blair, du Français Nicolas Sarkozy, du Chilien Aldo Ajello. Leur satisfaction réside dans cet espoir qu’ils nourrissent de voir un jour les richesses naturelles de la RDC profiter à ses voisins et, à travers ces derniers, à ceux qui en ont le plus besoin mais qui ont juré de ne jamais utiliser la voie normale pour y accéder.

L’OPINION CONGOLAISE OPPOSEE

La plupart des Congolais interrogés à ce sujet ont protesté contre la signature par le gouvernement de l’accord confectionné par les Nations unies. Les uns ont parlé d’un piège dans lequel le gouvernement est tombé, les autres ont fait état d’une complicité qui ne dit pas son nom.

De manière générale, l’opinion congolaise propose que la question soit soumise au référendum populaire et, dans une moindre mesure à l’appréciation des deux Chambres du Parlement. Elle estime que le souverain est souvent ignoré dans beaucoup d’engagements que prend le gouvernement. Elle rappelle que l’Accord-cadre signé le 24 février 2013 à Addis-Abeba est le quinzième d’une série dont les retombées positives n’ont jamais été constatées sur le terrain toujours en proie à un cycle de guerres assorties d’une situation humanitaire davantage dégradante.

Par ailleurs, nombreux sont les Congolais qui ne comprennent pas le jeu que joue le secrétaire général des Nations unies. Soit Ban Ki-Moon est naïf, soit il se rend coupable d’une initiative semblable à celle qui a abouti à l’éclatement de la Yougoslavie et du Soudan. 

Il faut dire qu’à Kampala, le M23 voulait une remise en cause profonde du système politique, politique, économique et social en place en RDC. Kinshasa s’est par contre cadré à la seule évaluation de l’accord du 23 mars 2009, signé à Goma, sur lequel le M23 avait justifié au départ son action armée. En faisant signer à Addis-Abeba l’accord-cadre de paix en RDC, Ban Ki-moon vient d’une certaine manière de s’approprier les revendications du M23. C’est par lui que Kinshasa se voit aujourd’hui contraint de les intégrer entièrement dans les discussions de Kampala.

Si l’issue des pourparlers de Kampala demeure encore incertaine, l’évolution des événements sur le front diplomatique jouent comme toujours en défaveur de la RDC. Ce qui témoigne du degré de compromission au niveau interne de la RDC. Depuis toujours, le ver a été dans le fruit. Et, malgré des pressions de tous genres de l’opinion, ceux qui travaillent à l’ombre pour la balkanisation de la RDC n’ont pas lâché prise. Sinon rien ne saurait justifier la part belle accordée aux pays, supposés agresseurs, dans le dernier accord-cadre d’Addis-Abeba. Dans la capitale éthiopienne, la RDC a tout concédé sans pour autant obtenir de ses voisins des garanties nécessaires pour un retour rapide de la paix dans sa partie Est.
 
Mwalimu Kadari M. Mwene-Kabyana, Ph.D.

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