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DOSSIER SPÉCIAL SUR LA CRISE DE LÉGITIMITÉ

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CRISE DE LÉGITIMITÉ HIER, AUJOURD’HUI ET DEMAIN?
Récit du biographe de Kasa-vubu, Charle André Gilis dans " Kasa-vubu au coeur de la crise Congolaise". Kasa-vubu et Lumumba : Deux leaders politiques, deux poids lourds, deux styles, deux projets de société, deux mythes.
Nous avons voulu profiter de ce Discours-Programme du 12 Décembre 1965 pour expliquer la crise de légitimité depuis tous les coups d’État successifs : de la révocation anticonstitutionnelle de Lumumba par Kasa Vubu jusqu’à la descente en enfer avec le coup d’État du 25 novembre 1965 :
« 12 Décembre 1965 :Discours-Programme justifiant le bien fondé du coup d’État pour prétendre barrer la route aux dirigeants de la Première République de ne pas vendre le pays à l’étranger ».
Pour éclairer la crise de légitimité actuelle, nous avions déjà montré que les mêmes causes produisaient les mêmes effets.
Nous allons le démontrer à travers des textes authentiques du vivant des acteurs par des premiers témoins. Nous le ferons en trois parties : dans la première partie, nous verrons les antécédents de cette crise de légitimité avant même l’indépendance et quelques jours après l’indépendance.
Dans la deuxième partie, nous verrons le récit du biographe de Kasa Vubu, Charle André Gilis dans " Kasa-vubu au coeur de la crise Congolaise".
Nous terminerons par une comparaison avec la crise de légitimité depuis la deuxième République jusqu’aujourd’hui.
Nous tenons à prévenir nos compatriotes que ce voyage à travers trois Républiques sera un peu long que d’habitude avec des références comme repères pour mieux nous guider en cas de consultation selon les convenances de chacune ou chacun.
Ière Partie : Les antécédents de la crise de légitimité avant et après l’indépendance.
Nous allons tout simplement aligner des citations de référence pour faire un commentaire à la conclusion.
Constance des intrigues, trahisons et crise de légitimité selon le principe impérialiste de diviser pour mieux régner: Lumumba diabolisé comme dangereux agitateur, communiste, dictateur par ses adversaires collaborateurs des impérialistes Belges.
1. Prise de conscience des ces intrigues et de la corruption avant même l’indépendance du 30 juin 1960:Lumumba, adversaire implacable des collaborateurs
*Avant l'indépendance déjà, Lumumba avait pris conscience du danger que représentait l'existence de toute une couche de Noirs qui rêvaient de s'enrichir en monnayant leurs services auprès des financiers étrangers.
*Après les élections de mai 60 on assista à diverses tentatives de formation d'un bloc anti-lumumbiste groupant toutes les forces collaboratrices.
« En mai, Iléo et Bolikango parcoururent l'ensemble du Congo. "Au cours de cette tournée (...) nous avons posé les jalons pour la formation d'un grand cartel d'Union nationale au Congo dirigé contre la dictature», expliqua Bolikango (Congo 1960,1, pp. 273-274).
Le 21 mai, le leader de la Luka, M. Delvaux, invita ses "amis Bahizi, Anekonzapa, Iléo, Kamitatu, Sendwe, Bolikango, Kanza et de nombreux chefs coutumiers (...) à un congrès fixé au 30 maiafin de barrer la route à un régime de dictature crypto-communiste" (Congo 1960, l ,p. 273). Cette initiative resta sans suite.
*Dès le 2 juin, Lumumba avait clairement compris l'enjeu de la campagne qui se menait contre sa personne. « L'objectif poursuivi est le suivant: écarter de la direction du pays les nationalistes qui ont pourtant la confiance du peuple, et hisser au pouvoir certaines marionnettes, dans le seul but de servir certains intérêts occultes. Convaincu que les milieux officiels veulent à tout prix placer un gouvernement fantoche au Congo, afin de saper ainsi l'indépendance nationale, le peuple congolais a réagi et continue à réagir avec énergie»(Conférence de presse de Lumumba à Léopoldville, cité par W.J. GANSHOF VANDERMEERSCH,o.c.,p. 141).
« On a corrumpu déjà certains élus en faveur de tel leader jugé favorable au gouvernement belge. Ainsi, on a vu, dans cette composition imaginaire, M. Iléo premier ministre. Il n'a en réalité pas de parti et n'a rien derrière lui. On lui a payé un voyage à travers le Congo pour essayer de corrompre d'autres milieux (...) Qui paye tout cela? D'où vient l'argent? » (L'Avenir, 3 juin 1960, pp. 6,8 cité par W.J. GANSHOF VAN DERMEERSCH, o.c., p. 142).
Cette dénonciation des 'Nègres payés', corrompus par des puissances étrangères, sera reprise quatre années plus tard, par les millions de paysans et de travailleurs engagés dans l'insurrection muleliste.
2. Sabotage de l'indépendance comme volonté du peuple par des manoeuvres de certains partis minoritaires pro colonialistes contre les partis et les leaders nationalistes.
Un autre thème de cette révolution figure dans le communiqué du 11 juin 1960 du Comité national du MNC-Lumumba qui « dénonce les manœuvres qui se trament entre, d'une part, l'ancienne puissance coloniale et, d'autre part, certains partis minoritaires pro colonialistes, manœuvres tendant à écarter, contre la volonté du peuple, les partis et les leaders nationalistes (...) Ces manœuvres constituent un sabotage sournois contre l'indépendance nationale» Communiqué du 11 juin 1960 du Comité National du MNC-L cité par W. J. G AN-SHOFVANDERMEERSCH,o.c.,p. 150.
Le 19 juin 1960, Kasavubu tenta de trouver une majorité antilumum-biste pour former un gouvernement où aucun membre du MNC-Lumumba et du PSA-Gizenga ne siégerait. On assista à un rapprochement entre les chefs coutumiers et les bourgeois engagés dans la collaboration, d'une part, et les formations réformistes d'autre part. Dans le projet de l'équipe gouvernementale avancé par Kasavubu, on retrouvait les grands noms de la collaboration : cinq hommes du PNP, dont Delvaux aux Finances, Dericoyard aux Travaux publics, Edindali aux Classes moyennes et deux dirigeants de la Conakat: Nyembo à la Défense et Kisiba à l'économie. Dans ce projet figuraient aussi les chefs de file des grands courants réformistes: deux de l'Abako, Kasavubu, premier ministre et Kisolokele, ministre de l'Intérieur, quatre du MNC-Kalonji, dont le chef serait vice-premier ministre et Badibanga, ministre du Plan. Du PSA, Kasavubu avait débauché Kamitatu pour en faire son ministre des Terres et du Domaine public. (W.J. GANSHOF VAN DERMEERSCH, o.c., annexe IX).
Au lendemain de l'indépendance, tous les nains politiques qui brûlaient d'impatience à devenir de grands bourgeois, s'acharnaient sur les lumum-bistes. Le chef du gouvernement, qui pendant un temps s'était laisser berner par les mirages de l'unité nationale, se rendit rapidement compte que l'ennemi disposait désormais de solides appuis parmi la couche privili-giée noire.
Dès le 18 juillet, il entrevit le drame avenir: « Etant un gouvernement nationaliste, qui ne vise que l'intérêt de la Patrie, ceux qui convoitent nos richesses tentent de provoquer l'anarchie, de démoraliser les membres du gouvernement pour finalement monter la population contre nous et faire tomber notre gouvernement. Ils se servent de marionnettes qui n'hésiteront pas à signer aveuglement n'importe quel accord pour placer le Congo sous une domination étrangère. Voilà la vérité»Annales de la Chambre des Représentants de la République du Congo. Année 1960, 12, séance du 18 juillet, p. 17).
Lumumba eut bientôt à affronter deux de ses plus perfides ennemis qui, quatre années plus tard seront particulièrement visés par les insurgés mulelistes.
3. Bras de fer entre Lumumba et le duo Kasa-vubu et Mobutu: coup d'État constitutionnel et crise de légitimité
Le 5 septembre, Kasavubu convoqua Andrew Cordier, le représentant personnel ad intérim du secrétaire général de l'ONU, pour lui annoncer qu'il allait tenter un coup d'Etat et lui demander que les forces de l'ONU arrêtent Lumumba et ses partisans les plus influents (K. VON HORN, o.c., p. 195)
Le même soir, à 21 h 40, Lumumba parla à la radio: « M. Kasavubu (...) a publiquement trahi la nation (...) Il veut détruire le gouvernement du peuple, (...) qui a lutté avec acharnement contre les agresseurs belges, contre les ennemis de notre indépendance nationale et de notre liberté (...) C'est une manœuvre belge qui vient de se faire aujourd'hui par M. Kasavubu, un complot tramé par les impérialistes belges et français» (Congo 1960, 2, pp. 820-821)
Kasavubu ayant échoué dans sa tentative d'évincer Lumumba de la vie politique, Mobutu entra lui-même en scène pour parachever le coup d'Etat.
Le 14 septembre, Mobutu 'neutralisa' les deux adversaires, Lumumba et Kasavubu, à la grande hilarité de ce dernier qui contresignera en tant que président de la République tous les diktats du colonel.
Le lendemain matin, Serge Michel diffusa un communiqué écrit de la main de Lumumba: « Le gouvernement central de la République de Congo porte à la connaissance du peuple que le colonel Mobutu, chef d'état-major des forces armées, a été corrompu par les impérialistes pour jouer un coup d'Etat contre le gouvernement légal et populaire » VoirS. MICHEL, Uhuru, Paris, 1961, pp. 233-234.
Une autre réaction de Lumumba après le coup d'Etat est consignée dans le livre que Monheim a écrit pour encenser Mobutu.
Lumumba déclara au commandant Jacques Puati: « Mobutu est un traître. C'est moi qui l'ai nourri; c'est moi qui lui donnais ses chemises. C'était un clochard»F.MONHEIM, o.c., pp. 137-138.
4. Quand l'ONU devient complice de stabilisation de l'insécurité avec la complicité des marionnettes.
Lumumba mobilisales éléments nationalistes de l'ANC pour engager le combat contre l'ennemi.
Le 8 août 1960, les intrigues de l'ambassade américaine et du commandement des forces de l'ONU aboutirent: le Conseil de sécurité adopta une résolution stipulant que les troupes de l'ONU restent en marge de tout conflit d'ordre intérieur. Ainsi, l'ONU considérait désormais l'occupation belge du Katanga comme une 'affaire intérieure' et elle se consacrera à garantir la consolidation de la sécession. Inspiré par cette décision et poussé dans le dos par la Forminière, une filiale de la Société générale, Albert Kalonji proclama le 9 aoûtl'indépendance de l'Etat minier du Kasaï.
Désormais, Lumumba ne compta plus que sur ses propres forces. Il concentra ses meilleures troupes en vue d'une opération contre les comploteurs du Katanga et du Sud-KasaïVoir J. CHOME, L'ascension de Mobutu, Bruxelles, 1974, p. 52-54.).
Le 26 août, 300 soldats lumumbis-tes occupèrent Bakwanga, la capitale du Sud-Kasaï.
Mobutu arrêta l'offensive victorieuse sur ordre des Américains, comme le reconnut son hagiographe Francis Monheim: « Le colonel Mobutu est écœuré. Sans consulter personne, il donne ordre à ses troupes de revenir à Léopoldville. Lundala, qui se trouve à Luluabourg, voit donc revenir ses hommes et le général entre dans une rage folle. Il se rend aussitôt dans la capitale et va voir Lumumba. Celui-ci (...) convoque son chef d'état-major. Je suis ministre de la Défense nationale, dit-il à Mobutu, et je ne suis au courant de rien. Vous, vous n'êtes qu'un simple colonel et vous ordonnez le cessez-le-feu sans même consulter votre commandant en chef, le général Lundula» Voir F. MONHEIM, Mobutu, l'homme seul, Bruxelles, 1962, p. 115.
La même trahison se reproduisit quelques semaines plus tard au Katanga où l'ONU et Mobutu décrétèrent le cessez-le-feu pour stopper l'avance de l'armée lumumbiste et pour sauver l'Etat fantoche de Tshombe d'un effondrement imminent. L'ONU évacua 2.500 soldats nationalistes qui avaient déjà pénétré profondément au Katanga.
Le 5 septembre 1960, Kasavubu décida la dissolution du gouvernement Lumumba. Il exigea que les soldats de l'ANC déposent les armes. Lumumba lui répondit: « Le gouvernement rend hommage aux troupes de l'ANC pour le patriotisme et l'héroïsme avec lesquels elles ont défendu jusqu'ici la nation contre l'agression et les mouvements de sédition colportés à travers le pays par les impérialistes belges. L'intention de Monsieur Kasavubu est d'empêcher les troupes de l'ANC d'entrer au Katanga dans le but de libérer leurs frères opprimés et asservis par les Belges et leur homme de paille Tshombe» Lire La Pensée politique de Patrice Lumumba, p. 353).

Deux jours plus tard, devant le Sénat, Lumumba continua à faire le procès de Kasavubu: «Pour lui, le fait de vouloir réintégrer le Katanga pour libérer nos frères, est une guerre atroce,
parce qu'il a déjà des contacts avec Tshombe. Alors que la victoire du Gouvernement central au Katanga est une victoire sur l'impérialisme» Lire Annales de la Chambre des Représentants de la République du Congo. Année 1960,19, Séance du 7 septembre, p. 20.

Le 14 septembre 1960, Mobutu organisa son premier coup d'Etat dans le seul but d'éliminer Lumumba de la scène politique. Ce dernier fut pratiquement assigné à résidence sous la surveillance de troupes de l'ONU. A quelque distance, l'armée de Mobutu le guettait ...
5. Arrestation et assassinat de Lumumba
Pongo, qui commandait les soldats, déclara: « Le chef de l'Etat est fort indigné de votre conduite. Je ne suis pas venu pour vous arrêter mais pour vous faire rentrer à la capitale ». Lumumba lui répondit: « Je sais que vous allez me tuer. Aujourd'hui, vous écoutez Kasavubu, Nendaka, Mobutu, mais après ma mort, ils deviendront vos ennemis. Soyez certains que vous n'allez pas rester longtemps auprès de vos femmes. Je suis le Premier ministre, pourquoi devrais-je demander la permission à qui que ce soit pour me déplacer ? »
Les soldats hésitèrent. Mais Pongo mit fin à la palabre et embarqua son prisonnier sur le bac. Lire Entretiens avec M. Kemishanga, Brazzaville, septembre 1984.
Le jour suivant, à 17 h 15, Lumumba, les mains liées, le corps meurtri et ensanglanté, arriva à l'aéroport de Ndjili. Il fut violemment jeté dans un camion à coups de crosses et immédiatement conduit à la résidence de Mobutu qui donna l'ordre de l'emprisonner au camp de Binza. Lire L'ONU et le Congo in Chronique de Politique Etrangère, (Bruxelles), 15,1962, p. 669.
Le 17 janvier 1961, Mobutu et Kasavubu décidèrent de livrer Lumumba aux Katangais.
Le soir même, il sera assassiné sous les yeux de Tshombe, Munongo et Kibwe. (Rapport de la Commission d'Enquête de l'ONU, Assemblée Générale A-4964, S- 4976 in Chronique de Politique Etrangère, 15, 4-6, 1962, pp. 675-696).
Le 13 février, Munongo déclarera lors d'une conférence de presse: « Je sais que certains diront que nous l'avons assassiné. Je réponds: prouvez-le» (Ibid., p. 688).
Ce sera le début de la campagne d'extermination des grands leaders nationalistes par laquelle les impérialistes voulaient assurer 'la tranquilité' de leurs affaires au Congo.
La liste des martyrs sera impressionnante:
1. Maurice Mpolo, ministre de la Jeunesse, nommé général et chef d'état-major par Lumumba;
2. Joseph Mbuyi, ministre des Classes moyennes;
3. Joseph Okito, président du Sénat;
4. Jean-Pierre Finant, président du gouvernement provincial à Stanleyville;
5. Christophe Muzungu, directeur de la Sûreté sous le gouvernement Lumumba;
6. Fataki, commandant de la gendarmerie à Stanleyville;
7. Emmanuel Nzuzi, secrétaire général de la Jeunesse MNC-L;
8. Barthélémy Mujanayi, gouverneur de la Banque centrale;
9. Pierre-Léopold Elengesa, cadre influent du MNC-L
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II ème PARTIE : Récit du biographe de Kasa-vubu, Charle André Gilis dans " Kasa-vubu au coeur de la crise Congolaise".

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