Toutes sortes des fulminations sont adressées à la Majorité Présidentielle si, profitant de sa majorité parlementaire et de sa forte représentation aux institutions, ose initier la révision de l’article 220 de la Constitution du 18 février 2014 qui limite à deux le nombre des mandats présidentiels en RDC. C’est cette situation qui justifie la présente réflexion pour savoir ce qu’il en est. D’où est venue la tradition constitutionnelle de limiter le nombre des mandats présidentiels à deux ? Qu’est-ce qui justifie la limitation nombre des mandats à deux ? Quelle est la base historique en RDC de la limitation du nombre des mandats à deux ? Quelle serait, par rapport à ce débat, l’orthodoxie ?
Avant d’explorer les profondeurs de cette problématique, cherchons à savoir si un nombre illimité des mandats est contraire à la démocratie ou à la culture politique de participation. La démocratie, qui vise en définitive l’exercice du pouvoir pour le bonheur du peuple, ne heurte pas le caractère illimité du nombre des mandats présidentiels. C’est autant dire que le nombre illimité des mandats présidentiels n’est pas antidémocratique dans la mesure où le Président en fonction assure le social du peuple, la paix, la stabilité, la concorde et la sécurité dans le pays. Tout ce qui compte en démocratie est qu’il ait suffrage universel, donc l’organisation des élections et que ne passe au pouvoir que celui qui les aura gagnées et qui assurera le bien de l’Etat. D’ailleurs, la démocratie est définie à partir de trois conditions à savoir :
L’élection des dirigeants au suffrage universel (remarquez qu’il en existe de deux types, directe et indirect, et qu’ici ni l’un ni l’autre n’est imposé ou que le choix de l’un et l’autre ne heurte pas l’esprit démocratique)
La nécessité de prendre garde à la limitation de l’exercice des attributions des gouvernants par des règles de séparation et de contrôle des pouvoirs.
La mise en place d’un « Etat de droit » qui accorde des garanties aux libertés individuelles ou collectives
Même si l’on prend la définition qui veut que la démocratie soit « le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple », rien ne permet d’affirmer que l’érection en loi du nombre illimité des mandats présidentiels est contraire à la démocratie. D’ailleurs, cette définition ne sacralise que la finalité en faveur du peuple de tout exercice de pouvoir que le peuple lui-même détient et octroie via le mécanisme électoral.
D’où est venue la tradition constitutionnelle de limiter le nombre des mandats présidentiels à deux ?
Dans le monde, il n’y a que deux démocraties célèbres, la démocratie américaine et celle française. Si la durée du mandat présidentiel est différente dans ces deux démocraties, le nombre des mandats qu’un Président puisse briguer est limité à deux. Français et Américains ont leurs raisons et réalités qui les ont poussés à limiter à deux le nombre des mandats présidentiels sans pour autant que cela ne soit une règle ou la vérité en démocratie ou dans l’existence. Tout au-moins, cette limitation ne peut servir que de matière de réflexion sans être par elle-même la vérité. Y aurait-il des raisons historiques qui ont poussé Français et Américains à limiter ainsi le nombre des mandats présidentiels ? Donc la limitation à deux est une coutume constitutionnelle sans être ni non bousculables ni la vérité absolu. D’ailleurs en RDC, on en fait cas que parce que dans un premier temps, on l’a ainsi inscrit dans la Constitution. N’y a-t-il pas de Constitution d’une République dans le monde qui autorise plus de deux mandats à un chef de l’Etat ? C’est donc une simple convenance et non la vérité qui tient compte de facteurs qui ne sont pas uniformes dans tous les Etats du monde.
Qu’est-ce qui justifie la limitation nombre des mandats à deux ?
Les réponses à cette question ne font pas l’unanimité à travers le monde. Si pour les uns, cela sert à l’alternance, remarquons tout de suite que dans l’histoire de l’humanité, toutes les alternances n’ont pas produit les résultats escomptés. C’est, comme nous l’avons dit, une convenance et non une vérité. C’est donc une aberration que d’apprécier le nombre des mandats d’une Constitution donnée en la comparant à d’autres Constitutions. Le fait qu’on change le nombre des mandats n’exclut pas non plus l’alternance qui intervient si l’ancien président se fait battre à l’élection.
Quelle est la base historique en RDC de la limitation du nombre des mandats à deux ?
Sans doute, les abus de Mobutu servent de base à la limitation du nombre des mandats à deux. Remarquons que Mobutu était toujours le candidat unique et ne tolérait pas de challenger, ce qui n’est pas le cas avec Kabila.
Quelle serait, par rapport à ce débat, l’orthodoxie ?
Que le nombre de mandats soit illimité et que seule la défaite électorale du président en fin mandature donne le go à l’alternance. Que la crainte de l’adversaire ne justifie pas des actions inconsidérées et incendiaires de la part de mauvais challengers qui essaieraient de manipuler les masses ignorantes ou insuffisamment informées.
Si quelqu’un veut créer des problèmes à la RDC, qu’il ne se serve donc pas du projet de révision constitutionnelle pour le faire. Cette matière étant démythifiée, que ceux qui ont des ambitions tiennent compte de cette réalité pour adapter leurs stratégies électorales à l’instar du Sénégalais, l’actuel Président du Sénégal Macky Sall qui a battu Wade, l’ancien président qui a passé deux mandats de suite au pouvoir.
Samy BOSONGO