Le Phare du 30 nov;2012
Date: Fri, 7 Dec 2012 17:05:59 +0100
Chers Tous,
Vous trouverez utile, j'espere, de lire ce qui suit.
Aujourd'hui en RDC, nombreux se reclament "specialistes" en matieres ayant trait a la situation trouble qui prevaut dans l'Est du Pays.
Les echanges ci-apres nous en offrent un cadre d'auto-evaluation.
Salutations distinguees et bon weekend!
Date: Fri, 7 Dec 2012 17:05:59 +0100
Chers Tous,
Vous trouverez utile, j'espere, de lire ce qui suit.
Aujourd'hui en RDC, nombreux se reclament "specialistes" en matieres ayant trait a la situation trouble qui prevaut dans l'Est du Pays.
Les echanges ci-apres nous en offrent un cadre d'auto-evaluation.
Salutations distinguees et bon weekend!
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Alain Mubalama
Alain Mubalama
Frère Wemba et tous les autres frères et soeurs,
Eh bien, si Mobutu était là -- car c'est la proposition -- il aurait été très confus... Après quoi, une colère sainte, en plus justifiée, se serait emparée de lui et lui dicter une décision d'en finir dans le sens de résoudre définivement le problème. C'est ce que tout congolais a le droit d'attendre des partis politiques du pays.
Pour éviter d'être très long, il faut dire que c'est la colonisation belge qui a créée le fond du problème : implanter des Rwandais attachés à leur terre (Rwanda) et ayant le sentiment que les nouvelles terres devenaient les leurs en RDCongo. Les Nations Unies, premier administrateur du Rwanda après la victoire des Alliés sur les pays de l'Axe, ont également participé à cette implantation. Citons, à cet effet, Spitaels, le responsable de l'activité de transplantation : « Notre œuvre de transplantation de populations Banyaruanda apparaît comme une grande œuvre humaine et il nous plaît de rappeler que M. Laurentie, délégué auprès de la « Mission de visite de l’ONU » au Ruanda-Urundi, a déclaré, en 1948, après avoir examiné sur place les données du problème, qu’il serait heureux de voir recommander à la Belgique de mettre au point l’émigration d’une partie de la population du Ruanda-Urundi au Congo belge ». En plus, aux années 1960 qui ont vu les Tutsi fuir leur pays, l'ONU a créé des camps des réfugiés qui, peu après, se sont mêlés aux populations congolaises. L'ONU peut encore avoir de la documentation sur les personnes qui avaient quittées le Rwanda pour la RDCongo... Malgré tout ceci, il faut reconnaître que les politiques dictatoriales des 32 années de Mobutu ont aggravé une situation déjà explosive.
En fait, à l'indépendance, le gouvernement congolais était sensé poursuivre les politiques du gouvernement belge sous la direction de Buisseret, lequel venait de découvrir qu'il y avait un problème dans les populations implantées. Non seulement le gouvernement belge a reconnu l'existence du problème, mais il a voulu y apporter des correctives. Sauf que l'indépendance est arrivée... Citons ici l'ambassadeur Mitima:
Dès 1949, le gouverneur de la Province du Kivu, M. Liesnard, affirmait que « La création de la chefferie Gishari a été une erreur politique. Les BanyaRwanda devront dépendre politiquement des Autorités indigènes du Congo Belge. Nous ne pouvons pas spolier les Autochtones de leurs terres (…) ». Mais dès 1958, les Services spéciaux de la province du Kivu estimaient de la plus haute importance de rappeler aux Autorité coloniales la persistance du danger malgré la suppression de cette Chefferie fantôme. Pour les autorités rwandaises, l’objectif de la création de la chefferie du Gishari était l’expansion rwandaise, et de ce fait, une source d’intrigues entre les uns et les autres. En 1958 donc, le renseignement provincial découvrent que « les anciens sous-chefs de Buchanayandi mènent une propagande sournoise contre l’autorité des BaHunde, tandis que d’autres BanyaRwanda contactent directement le Mwami du Rwanda afin qu’il soutienne les revendications rwandaises sur le Gishari (…) Si les immigrations des BanyaRwanda ont contribué à l’évolution agricole du territoire (de Masisi), on est en droit de se demander si ce (maigre) avantage économique contrebalance les ennuis politiques causés par la présence de ces non-congolais (sic). Il est à craindre que cette réalité ira, un jour, à l’encontre des instructions qui prévoient que les BanyaRwanda doivent être considérés à titre individuel et s’intégrer sous l’autorité des Chefs locaux ». Plus tard, faisant le bilan de l’action coloniale au Kivu, Maurice Wilaert la résume ainsi : « Le Kivu mis à la disposition du Rwanda 33.000 Ha (34910 Ha) au Gishari au nord-ouest du lac en territoire de Masisi. Des agriculteurs s’y fixèrent et virent que la terre était bonne : ils y trouvèrent un cadre typiquement rwandais créé pour eux par les Administrateurs du Congo et du Rwanda-Urundi avec l’aide de quelques grands seigneurs tutsi. Mais la double appartenance de ces foyers d’immigrants fit naître, dès l’origine, un malentendu plein de menace (…) Il est clair aussi que les terres du Kivu auraient dû être réservées à ses besoins propres ». (J.-B. Murairi Mitima, Les Bahunde aux pieds des volcans virunga (R.D. Congo), Études africaines, Ed. L’Harmattan, Paris 2005, pp. 165-166). Juste attirer votre attention sur l'histoire.
Le gouvernement congolais aurait du poursuivre les actes de correction de la situation dont la demande individuelle de la citoyenneté et le désengorgement du territoire-martyr de Masisi.
Les Rwandais (BanyaRwanda) -- Tutsi ou Hutu -- habitant Masisi-Lubero-Walikale, doivent savoir que l’ENTRÉE EN RDCongo, N'ÉTAIT NI OBLIGATOIRE NI ÉTERNELLE. « Cette immigration ne doit pas être considérée comme définitive. Notre action est, en effet, basée sur la plus complète liberté. L’immigrant qui n’est pas satisfait de son sort au Kivu est, nous l’avons dit, libre de retourner au Rwanda et cela arrive régulièrement, mais pas fréquemment » (Spitaels, commissaire de District du Nord-Kivu, responsable du plan d'implantation des populations rwandaises en RDCongo). Catherine Newbury, dans Cohesion of Oppression. Clientship and Ethnicity in Rwanda 1860 – 1960, Columbia University Press, New York 1988, pp. 143, 247 précise, dans une note explicative vantant les avantages d’émigrer en RDCongo qu’il existe une « liberté absolue de retourner au Rwanda quand ils le veulent car ils demeurent sujets du Mwami», donc citoyens rwandais... Il faut rappeler aux africains instrumentalisés dans la violence absurde pour le contrôle des minerais stratégiques que les Palestiniens, déplacés massivement en 1948, sont jusqu'ici demeurés réfugiés et jamais citoyens revendiquant des droits par la force des armes. Même pas en Jordanie où ils constituent la majorité de la population du royaume. "Septembre Noir" n'avait été qu'un cauchemard pour eux!
Dès les débuts de l'indépendance, je parle de 1963, le problème était là. Il y avait déjà la guerre dite "KanyaRwanda" où, des bombardiers éthiopiens, à la demande de Kinshasa étaient intervenus. Malgré cela, rien a été fait pour résoudre le problème à sa racine.
C’est le chercheur Jean-Claude Willame (dans État de crise et perspectives futures (février 1997). Rapport WRITENET (R.-U.), un réseau de chercheurs et d’auteurs d’écrits sur les droits de l’homme…) qui nous fait une synthèse de l’action aggravante de Mobutu. C’est avec maîtrise et mesure (balance) que l’auteur présente la situation. Il dit : « D’une toute autre gravité est la crise qui secoue les deux provinces du Kivu depuis 1993. Son origine tient en fait non pas à de simples antagonismes inter-ethniques ordinaires mais à une question de nationalité posée en fait depuis le début des années 1960… La question de savoir qui est Zaïrois et qui ne l’est pas est posée dans le Kivu montagneux dès les premières années de l’indépendance lorsque plusieurs dizaines de milliers de Tutsi, dont la plupart s’identifie aujourd’hui à l’appellation BanyaMulenge, fuient les pogroms ethniques au Rwanda en 1959-1961, en 1963-1964 et en 1973, tandis qu’un nombre indéterminé de Hutu se réfugie au Zaïre suite au génocide de 1972 dans le Burundi voisin. À ces mouvements forcés de populations, se superpose le problème de la présence d’une nombreuse population d’origine rwandaise que l’on appelle BanyaRwanda et sont 85000 à 90000 personnes ont été installées entre les années 1937 et 1945 par le colonisateur dans un territoire déjà surpeuplé pour servir de main d’œuvre dans les plantations coloniales de la région du Nord-Kivu ou dans les sites miniers du Katanga. En 1965 [1963 ?], une première guerre tribale, dénommée « KanyaRwanda » oppose les notables d’ethnies « congolais » (Hunde et Nyanga) à ceux des BanyaRwanda à propos du refus des seconds d’accepter l’autorité des premiers qui se considèrent comme les vrais natifs et occupants fonciers des territoires méridionaux du Nord-Kivu (Masisi, Walikale, Goma) ». En 1972, le président zaïrois calmera la tension larvée entre « Zaïrois » et « non-Zaïrois » en octroyant autoritairement la nationalité zaïroise à tous ceux qui résident dans la province du Kivu avant le 1er janvier 1950 (art. 1 de la loi 72-002 du 5 janvier 1972). Il faut préciser que cette loi a été inspirée par le lobby tutsi qui, à cette époque, est très influent autour du président de la République lequel a toujours privilégié les membres des groupes ethniques conscients de la précarité de leur statut social politique. Les « Rwandais »vont ainsi acquérir la nationalité zaïroise de plein droit … les BanyaRwanda vont accaparer les meilleurs terres en court-circuitant, par le recours à la législation « moderne », les règles coutumières d’attribution foncière des terres. À partir de 1978, date du renvoi du Tutsi rwandais B. Bisengimana du Bureau de la Présidence ; une marche arrière est opérée quant à la question de la nationalité des ressortissants d’origine et de langue rwandaise. Une nouvelle loi est votée par le Conseil législatif (parlement zaïrois) en 1981 et annule celle de 1972 … Même si l’inquiétude gagnait les « Rwandais » du Zaïre et en particulier les « barrons » tutsi du régime, le système de protection dont ils bénéficiaient continua à fonctionner4 tant au niveau local (accaparement des terres) qu’au niveau de l’élite. Ce ne fut qu’au moment où la Conférence Nationale Souveraine fut établie en 1991 que le vent se mit à tourner radicalement contre les représentants des BanyaRwanda qui furent exclus du conclave. En mars 1993, suite à un mouvement de désobéissance civile dans le territoire de Masisi majoritairement peuplé par les ressortissants d’expression rwandaise, un nouveau « KanyaRwanda » fut enclenchée. En quelques semaines, la « guerre » fit quelques 200 morts et surtout 130000 déplacées et 80 villages incendiés ».
Un autre évènement est venu du même problème pendant les assises de la CNS. Mobutu, malade, était là. Il s'est beaucoup battu pour garder son pouvoir intact, mais pas pour laisser un pays débarassé de ce "cancer" rwandais. Il en a même ajouté. Tenez! Il a donné une partie de l'île d'Idjwi (Wawe) et une très grande concession forestière dans Walikale à son ami Juvénal Habyarimana. Le Rwanda des virulents extrémistes Tutsi croit que ces parties devraient revenir au Rwanda. D'ailleurs, la carte actuelle du Rwanda prend l'îlot de Wawe, un prolongement naturel d'Idjwi qui dérogerait à la délimitation des frontières aux accords diplomatiques de 1910 entre Belges, Allemands et Anglais.
Les gens, UDEMO, soient-ils doivent, selon moi, casser avec la démagogie. Ils doivent être réalistes et proposer des solutions qui considèrent la racine du mal. Les discours, on en a raz-le-bol au Kivu. Tout parti politique, mouvement de société constitué (y compris la société civile) devrait avoir une proposition réaliste et acceptable de la résolution du problème. C'est ce qui empêcherait un certain aventurisme dans l'approche vers une solution responsable et définitive. Toute solution doit considérer l'approche du gouvernement Buisseret: (1) les descendants rwandais font une demande individuelle de la nationalité congolaise; (2) les délinquants sont expulsés; (2) il faut, à tout prix, désengorger le Kivu de ces populations; etc. C'est cela, à mon avis, prendre un leadership dans une problématique nationale donnée. C'est la comprendre, la saisir et proposer des voies de solutions.
Merci pour votre temps et, mieux, de votre considération!
Mastaki 1er décembre 2012