LUNDI, 10 DÉCEMBRE 2012 16:05
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Début du dialogue entre Kinshasa et les mutins, presque lâchés par Kigali et dépourvus du soutien populaire susceptible de lui donner la légitimité et de l’aider à faire triompher ses thèses. Il y a trois manières d’appréhender le Mouvement du 23 mars -M23. Via sa dénomination tirée des accords du 23 mars 2009 signés entre le gouvernement de Kinshasa auxquels le mouvement du trio tutsi Runiga-Ruzangiza-Rukogoza n’a jamais été partie. Ou via son cliché de force négative, bras armé du Rwanda, son principal soutien, selon l’ONU. Ou via l’issue de la mutinerie des officiers rwandophones transfuges de l’ex-CNDP dont la plus grande aventure, notamment la prise de Goma, n’a jamais reçu l’adhésion populaire et a été stoppée par un simple communiqué lu depuis Kampala.
Pour relier ces trois images, il fallait faire le déplacement de Kampala, la capitale de la République d’Ouganda, où s’est ouvert, dimanche 9 décembre, le dialogue entre le gouvernement de la RDCongo et le M23. Il fallait assister à la cérémonie d’ouverture pour déceler le manque de logique et de cohérence dans le discours de François Rukogoza, ex-cadre du CNDP, ancien ministre provincial de la Justice du Nord-Kivu repassé dans la rébellion, secrétaire exécutif et chef de la délégation du M23 aux assises de Kampala.
Rukogoza a mêlé les revendications de sa bande, en réalité une affaire de promotions et dé grades dans l’Armée, à un cahier des charges qui n’a rien à voir avec l’accord du 23 mars. Français approximatif, chiffres et données peu ou mal fournis, le chef de la délégation a prouvé qu’il n’a pas la maîtrise de son sujet. Qu’il s’agisse de parler bonne gouvernance alors qu’en quinze jours de règne, Goma a connu un bordel financier et administratif. Qu’il s’agisse des questions de droits de l’homme ou de démocratie alors que les leaders du M23 sont poursuivis et leurs avoirs gelés -pour violation de l’embargo sur les armes et recrutement des mineurs. Qu’il s’agisse de se donner la vocation d’un gendarme chargé de jouer au bouclier des gouvernements étrangers alliés, Rukogoza a dévoilé l’identité du M23 : un groupe de bandits, peu crédibles, habiles à tirer leur légitimité de la kalachnikov.
C’est sans état d’âme que Raymond Tshibanda, ministre des Affaires étrangères et chef de la délégation RD-congolaise, leur a fait connaître la position ferme de Kinshasa : l’acte de décès du M23. «Il n’y a dans ce dialogue qu’une seule issue possible : la fin de la rébellion… », a tapé Tshibanda, pressé de passer à l’essentiel.
La délégation RD-congolaise n’avait même pas l’intention de le dire à la presse. Dans un combat apparemment gagné d’avance, le M23 a ouvert la brèche en distillant un discours destiné à l’intox, hors du cadre de l’accord, dépeignant en des termes discourtois un gouvernement légalement et démocratiquement élu. Entre le M23 et Kinshasa, l’heure est au déballage, à la non complaisance. C’est le plus important.
Sur le plan régional, Kinshasa bénéficie désormais du soutien de la région. La Conférence internationale de la région des grands lacs -CIRGL- a délimité les contours des pourparlers. Le 20 novembre, Kagame et Museveni se sont montrés solidaires à Kabila, disant clairement qu’il est hors de question de déstabiliser le régime en place à Kinshasa. Le 24 novembre, la CIRGL a demandé au gouvernement d’évaluer l’accord du 23 mars 2009 et de trouver des solutions aux revendications légitimes des rebelles. Et Tshibanda de préciser: «Nous allons loyalement discuter pour écouter leurs pro blêmes mais il ne sera pas question de remettre en cause la constitution ou les institutions démocratiquement élues ou encore le caractère républicain de l‘Armée et de la Police».
On ne peut pas faire des cadeaux à un groupe qui tue, pille, viole, empêche les enfants d’aller à l’école et aux déplacés d’accéder à l’aide humanitaire.
Depuis 20 ans, on vit le même scénario... pour les mêmes résultats. Kinshasa a changé de stratégie optant pour la transparence. Afin que nul n’en ignore et pour éviter d’éventuelles mauvaises interprétations, le gouvernement a associé des témoins aux discussions. Des sénateurs -Léon Engulu, Mulayila...-, des députés -Charles Mwando, Konde vila Kikanda, Léonard Mashako Mamba-, des icônes de l’Opposition -François Muamba Tshishimbi, Christian Badibangi. . .- et des délégués de la Société civile ont été invités à Kampala. Kinshasa en a mare d’être sans cesse le dindon de la farce après plusieurs négociations avec la même souche.
Entre 1998 et 2009, le pays a presque tout fait, quasiment tout donné, prenant même le risque de frustrer les loyalistes en accordant tour à tour des faveurs aux ex-combattants RCD, à Laurent Nkunda … et aux ex du CNDP-Nkunda et à ceux du CNDP-Ntaganda. Chaque fois, on est revenu à la case de départ : les rebelles intégrés dans l’armée n’ont jamais accepté d’être éloignés de leurs bastions de l’Est pour des raisons évidentes.
Intransigeant
Cette fois-ci, Kinshasa semble déterminée à ne rien céder. Elle ne négociera pas sur son armée et sa police. Elle ne négociera rien qui touche à l’intégrité du territoire et à la stabilité des institutions. Coïncidence, l’Ouganda dont des sujets et non pas le gouvernement -une précision de taille- sont formellement impliqués dans la guerre entend contribuer à la fin du conflit Museveni, président en exercice de la CIRGL, parrain de Kagame, le président rwandais accusé d’être le mentor du M23 par l’ONU, se défie. Il joue son honneur.
Intransigeant
Cette fois-ci, Kinshasa semble déterminée à ne rien céder. Elle ne négociera pas sur son armée et sa police. Elle ne négociera rien qui touche à l’intégrité du territoire et à la stabilité des institutions. Coïncidence, l’Ouganda dont des sujets et non pas le gouvernement -une précision de taille- sont formellement impliqués dans la guerre entend contribuer à la fin du conflit Museveni, président en exercice de la CIRGL, parrain de Kagame, le président rwandais accusé d’être le mentor du M23 par l’ONU, se défie. Il joue son honneur.
C’est clair, aux milieux des jeux d’intérêt -sécuritaires et économiques entre les Etats, les chefs d’Etat et les gouvernements de l’Ouganda, du Rwanda et de la RD-Congo, favorables au déploiement de la Force internationale neutre, le vulgaire M23 risque d’être sacrifié comme l’ont été Nkunda et Ntaganda. Signe évident : le mouvement a été sommé de quitter Goma via un simple communiqué.
La seule voie de sortie pour ses leaders recherchés reste de négocier, à l’instar de leurs deux devanciers, la fin des poursuites judiciaires. Ils ont tout intérêt à bien négocier l’ordre du jour à la séance prévue ce lundi. Mardi Il et mercredi 12 décembre sont respectivement consacrés aux pourparlers et à h phase de finalisation. L’organisation prévoit de délocaliser la suite des travaux à Goma … probablement pour la signature.
AKM
AKM